
Pourtant, chacun d’entre nous, à un moment ou à un autre, a pu être confronté à des situations qui ont parfois des conséquences importantes sur la santé, et qui accroissent de façon très sensible la pénibilité déjà lourde de notre activité de navigant.
DES CAUSES PROFESSIONNELLES TENANT À L’ENVIRONNEMENT
La Direction nous le rabâche sans cesse : « Air France est en butte à des concurrents toujours plus aguerris. Nous devons être extrêmement réactifs et flexibles, nous devons revoir notre organisation pour être plus souples et pour nous adapter… pour survivre ! »
Or, cette flexibilité, cette adaptabilité permanente ne sont pas désincarnées, elles tiennent pour l’essentiel dans les hommes et les femmes qui constituent l’organisation de l’entreprise.
Il nous appartient de discuter, voire de contester cette course éperdue aux gains de productivité, la lowcostisation du PNC et cette vision ultralibérale qui met l’accent sur la variabilité de la rémunération mesurée de façon individuelle et certaines idéologies managériales qui valorisent la performance individuelle, l’avancement au mérite et la notation permanente.
DES CAUSES PROFESSIONNELLES PLUS SPÉCIFIQUES
Les navigants cumulent d’autres sources de souffrance plus spécifiquement liées à leur activité. Toute tentative de dresser une liste exhaustive serait vaine, néanmoins, on peut citer les causes les plus évidentes et les plus fréquentes : une certaine désocialisation des membres d’équipages en décalage avec les rythmes sociaux de leur famille et/ou de leurs amis qui rend difficile le maintien d’un véritable lien social, les contraintes familiales alors que nous sommes absents loin du domicile pour des durées parfois longues, les problèmes de sûreté (alerte à la bombe, reconduits à la frontière, instabilité géopolitique), les déroutements, les incivilités voire les agressions à bord ou en escale, les décès à bord, les turbulences qui outre les dangers physiques accroissent l’angoisse et augmentent le stress, les suites des accidents aériens qui nous rappellent sans cesse que les vols peuvent se terminer en drame, les conditions de travail engendrant du surmenage, des troubles du sommeil, de l’anxiété voire de la dépression… et un encadrement peu, voire non, formé à ces problématiques.
DES CAUSES PROFESSIONNELLES TENANT À L’ORGANISATION DU TRAVAIL
Il faut insister sur ce point : ces phénomènes ne sont pas la marque de fragilités individuelles des salariés, mais sont plutôt révélateurs de dysfonctionnements plus généraux dans l’entreprise ou d’une organisation du travail qui est déficiente.
La recherche perpétuelle de gains de productivité PNC, les réorganisations (NEO), la rémunération individualisée qui fait perdre de vue l’intérêt global du collectif de travail, participent à ce phénomène qui se traduit par moins de coopération, moins de confiance dans le collectif, des responsabilités personnelles davantage mises en avant et un travail vécu comme une aventure singulière pour chacun.
Par ailleurs, on ne peut pas nier que « salaire à la tâche » et « conditions de travail » entretiennent des relations dangereuses. Un système de rémunération trop productiviste peut pousser les salariés à accepter une détérioration de leur qualité de vie ce qui peut avoir des conséquences lourdes pour la santé.
La médecine du travail AF constate une augmentation du nombre de PNC victimes de syndromes anxio-dépressifs, ce n’est malheureusement pas une surprise ! Les médecins précisent également que la prise en compte de ces difficultés par des modifications des règles de programmation des PNC a un effet notable et favorable (là encore, quelle surprise !). Le dépistage des PNC victimes de ce syndrome s’accompagne souvent d’arrêts de vol prolongés et d’une orientation chez des spécialistes.
Certains médecins du travail se plaignent même de reproches qui leur sont faits par la Direction d’AF pour le nombre d’arrêts de vols prononcés…
Lire la suite en PDF